Que s’est-il passé en Mai 68 ? Regards de femmes sur la « révolution sexuelle.

La « révolution sexuelle » a sa mythologie, elle aurait été le moment d’un renversement de la morale sexuelle préexistante, et un lieu d’avènement d’égalité en matière de sexualité. Ces deux mythes ayant la vie dure, on peut s’interroger sur la part de vérité inhérente à ces représentations.

Avant Mai 68, l’éducation sexuelle est totalement absente de la sphère familiale. Dans la plupart des classes sociales, les filles sont placées sous le contrôle des instances sociales qui leur apprennent que la sexualité doit être limitée à la vie conjugale, avec en perspective, le destin de devenir mère.

Dans les milieux de gauche, on bouscule volontiers les normes de l’échange amoureux et les conventions de l’échange matrimonial. On assiste à un rejet des normes conjugales traditionnelles qui fait sens dans un processus plus global de redéfinition de la cellule familiale.

Le mouvement féministe distille ses idées dans la société, y compris dans les milieux militants de gauche. Les femmes ont alors la possibilité de penser leur liberté à disposer de leur corps, c’est le moment où les femmes commencent à mettre en commun leurs expériences concernant leur intimité, leur sexualité (par exemple les problèmes de contraception, d’avortement…) en non mixité. Ces moments de paroles sont vécus comme particulièrement émancipateurs. Les féministes ont entre autres pour revendications de politiser ce qui se passe dans la sphère privée. Cela va transformer les attitudes des femmes exposées à ces idées vis-à-vis de leurs compagnons ; elles disent avoir dès lors été plus « exigeantes » en matière de responsabilité sexuelle avec ceux-ci. Les féministes vont alors dénoncer la prétendue « révolution sexuelle » en la qualifiant de « vaste duperie » au service de la domination masculine, leurs interprétations donnant une image plus nuancée des soi-disant subversions. Les féministes vont pointer du doigt cette ségrégation sexuelle dans nombre de leurs écrits.

L’évolution des normes sexuelles ayant eu lieu dans les années 68 reste une question clivante selon les sexes. Les pratiques dites de « l’amour libre » étant surtout liées au désir masculin, tout en n’étant pas ou peu désiré des femmes, beaucoup rapportent des situations de non consentement à ces relations. La contrainte à l’hétérosexualité était perceptible, beaucoup de femmes se sont senties dépossédées de la diffusion des techniques contraceptives par cette pression sociale leur intimant de se « libérer sexuellement ».

On constate que les hommes, une fois de plus, ont retourné contre les femmes le fruit de leurs conquêtes, à savoir les droits reproductifs tels que l’avortement et la contraception sitôt acquis (de haute lutte). La classe des hommes a su tirer parti de ces changements sociétaux pour renforcer l’exploitation sexuelle, user de stratégies pour faire accepter aux femmes des pratiques sexuelles dont elles ne voulaient pas. Cette tendance se révèle être toujours d’actualité. Le développement de la pornographie et de la prostitution, sous couvert d’émancipation et de liberté sexuelle, fait perdurer l’esclavage sexuel féminin, au mépris de la dignité et de la liberté des femmes.

Christine