Les voitures non-mixtes, un vrai pas en avant ?

Malgré la résurgence de la problématique des transports réservés aux femmes en Angleterre, la question demeure peu présente dans le débat public français. Bien que des initiatives aient été mises en œuvre tant du côté des pouvoirs publics que de la société civile, la question reste entière. 

Le harcèlement sexuel masculin dans les transports, où en est-on en France ? 

En 2017, la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (FNAUT) a publié une enquête dont les chiffres sont assez révélateurs de la problématique du harcèlement sexuel dans les transports publics. Quelques 6000 femmes ont répondu à l’enquête, majoritairement des étudiantes âgées de 18 à 25 ans. L’étude révèle ainsi que 72% des femmes interrogées craignent d’être harcelées dans les transports et que, de cette crainte découle une modification de l’utilisation des transports publics ou une adaptation de la tenue vestimentaire pour éviter les « situations dangereuses ». Mais quid de la liberté des femmes d’aller et venir sans être en proie permanente au danger ? 

Les données statistiques qui suivent demeurent alarmantes. En effet, 87% des femmes ont été harcelées lors de leur utilisation des transports publics. Si le chiffre est en baisse par rapport à l’étude menée par le Haut-Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes, il reste très élevé et, par conséquent, préoccupant ! 

La suite de l’enquête continue de mettre à nu le problème auquel doit faire face notre société. Elle se concentre sur les femmes ayant déjà été harcelées et révèle que 95% de celles-ci ont été harcelées par un homme, 55% par un groupe d’hommes. Ces femmes en ont majoritairement été victimes au sein des véhicules de transports (84%) ou sur les quais (57%). Ce harcèlement masculin a principalement lieu durant la journée aux heures de pointe ou au cours de la soirée. 

Un constat d’échec collectif s’ensuit… Ainsi, les femmes n’ont, pour la majorité, pas porté plainte et n’ont pas non plus été aidées par les témoins présent.e.s lors de ces agressions. 

Enfin, si pour les répondantes interrogées les mesures d’informations et de prévention sont efficaces, elles doivent, selon elles, impérativement être associées à de véritables solutions pour réagir efficacement dans les situations de harcèlement. 

Les voitures réservées aux femmes, une vraie solution ? 

Un succès parfois mitigé

Plusieurs pays ont, parfois depuis longtemps, adopté des mesures réactives consistant à la mise en place de voitures ou wagons réservés aux femmes dans les transports en commun. Ces voitures sont parfois instaurées pour les heures de pointe, pour les heures tardives ou de manière permanente en fonctions des pays. 

Au Japon, pays pionnier en la matière, cette mesure a été rapidement bien perçue par la population. D’ailleurs, les autorités japonaises ont veillé à ce que cette mise en œuvre soit accompagnée de moyens permettant le strict respect de cette séparation. Consécutivement à l’instauration de ces wagons réservés, la ville d’Osaka a enregistré une diminution du nombre de plaintes déposées par les victimes de harcèlement ou agression sexuels. L’Iran, l’Inde, la Thaïlande sont tant d’autres pays où la démarche s’est avérée être une réussite collective. 

Toutefois, ce phénomène a malheureusement essuyé plusieurs échecs dans de nombreux pays. Au Mexique, au Brésil ou encore en Egypte, les wagons réservés sont envahis par les hommes qui refusent d’acter la séparation. En 2009, une femme a même été agressée après avoir fait remarquer à un homme sa présence dans un wagon réservé. 

Pourquoi un tel constat d’échec ? Le manque de moyens tant dans le recrutement d’agent.e.s que dans le développement de moyens de prévention efficaces demeurent les principaux problèmes. En effet, une telle séparation des sexes nécessiterait la présence d’agents sur les quais voire dans les véhicules pour en garantir son respect. Ces échecs sont-ils l’aveu d’un énième manque de prise en compte de la sécurité des femmes ? 

Quid de la France ? 

En France, où l’arsenal juridique s’étoffe progressivement, le débat se poursuit. Cette mesure demeure, pour les spécialistes, une solution temporaire qui ne peut remplacer la mise en œuvre de politiques concrètes et de sanctions réelles contre les agresseurs, qu’ils se soient rendu coupables de harcèlement sexuel, d’agressions sexuelles ou de viols.

Plusieurs problèmes sont ainsi soulevés dans les sources consultées. D’une part, la vice-présidente du FNAUT, Christiane Dupart, rappelle le manque de moyens favorables à la réussite d’une telle entreprise. De plus, selon Pauline Chabbert, directrice associée du groupe Egaé, ce système constituerait un frein important à la réflexion autour du véritable problème, à savoir le sexisme dans l’espace public. D’autre part, de telles mesures pourraient envoyer un message tronqué aux agresseurs et favoriser le sentiment d’impunité face à de tels actes. Il pourrait également contribuer à la culpabilisation des victimes comme le souligne Héloïse Duché. 

Ainsi, d’autres mesures seraient à privilégier selon Christiane Dupart. Par exemple, plusieurs villes françaises ont expérimenté les arrêts sur demande dans les bus de nuit notamment à Nantes. Ou encore, à l’heure où le smartphone est indispensable, la mise en place d’applications (comme le 3117) pour tenter de lutter contre le harcèlement sexuel. Des initiatives collectives, publiques et privées, pour lutter contre un phénomène qui ne cesse de perdurer. 

Il ressort de ces éléments que peu de solutions pérennes sont mises en œuvre par les pouvoirs publics afin d’éradiquer ce type de violences dont les femmes continuent d’être victimes. Dès lors, il reste pertinent de se demander quand cette problématique du harcèlement, et des violences faites aux femmes dans leur ensemble, deviendront un véritable enjeu national.

Charlène

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *