IVG : face à l’offensive réactionnaire, la nécessité d’une mobilisation féministe

La crise du Covid a impacté l’accès à l’IVG en France. Elle a fait émerger des difficultés nouvelles à l’exercice de ce droit pourtant fondamental. Malgré la mise en place d’un certain nombre de mesures comme la prolongation de l’accès à l’IVG médicamenteuse à domicile de 7 à 9 semaines de grossesse, la possibilité pour les médecins et les sages-femmes de prescrire par le biais de téléconsultations ou encore le droit d’acheter des médicaments abortifs en pharmacie (1) ;  de nombreuses femmes se sont malheureusement trouvées hors des délais légaux pour accéder à une IVG. Des militantes féministes se sont alors mobilisées pour obtenir un allongement de ce délai de 2 semaines. Le 8 octobre 2020, les députés avaient voté en première lecture en faveur d’un allongement de 12 à 14 semaines du délai légal, bien que les échanges aient été vifs dans l’hémicycle. Mais le 17 février, lors de la deuxième lecture, la droite a déposé 423 amendements opposés à la prolongation du délai légal d’accès à l’IVG et sous la pression des conservateurs, le groupe socialiste a retiré la proposition de loi de la députée du Val de Marne, Albane Gaillot. (2)

Il semblerait que 49 ans après le procès de Bobigny, 46 ans après l’adoption de la loi Veil, le camp des conservateurs, des opposants à l’accès à l’IVG n’ait toujours pas désarmé. La liberté des femmes, leur droit à disposer librement de leurs corps dérangent toujours autant. Il faut dire que l’enjeu est de taille, il ne s’agit de rien de moins que d’un choix de société fondamental, du monde dans lequel nous voulons vivre, y aurait-il des nostalgiques du monde d’avant ? Celui des grossesses subies ? Du temps du servage pour les femmes ? Si la bataille pour le droit à l’IVG a été gagnée de haute lutte en 1975 avec l’adoption de la loi Veil, d’autres combats restent à mener aujourd’hui, en particulier celui de la prolongation du délai légal d’accès à l’IVG.

Un rapport d’information destiné à l’Assemblée Nationale sur l’accès à l’IVG en date du 16 septembre 2020 met en relief divers enjeux autour d’un droit qui reste fragile, et sans cesse en butte aux attaques des conservateurs d’aujourd’hui. Le nombre d’IVG reste stable depuis 2001, variant entre 225 000 et 230 000, il concerne environ une grossesse sur quatre et on dénombre approximativement une IVG pour 3 naissances. L’accès à l’IVG est inégal selon les territoires, notamment en ce qui concerne les délais de prise en charge, ce qui pénalise les femmes les plus vulnérables et les plus démunies. Chaque année, entre 3 000 et 5 000 femmes françaises sont contraintes de se rendre à l’étranger pour pouvoir avorter, ayant dépassé le délai légal en France. Ce rapport d’information a formulé 25 recommandations, dont l’allongement du délai légal pour pratiquer une IVG chirurgicale de 12 à 14 semaines fait partie. Les autres recommandations sont tout aussi importantes et appellent également une mobilisation : l’exonération généralisée d’avance de frais inhérents à l’IVG, une clarification de la réglementation pour garantir le droit à l’anonymat et à la confidentialité, la lutte contre la désinformation sur Internet, la réalisation d’un bilan de l’application de la législation relative au délit d’entrave pour la rendre plus efficiente… (3)

Osez Le Féminisme ! milite pour l’allongement du délai légal d’accès à l’IVG. La France, qui joue un rôle majeur dans la diplomatie féministe internationale, se doit d’être irréprochable lorsqu’il s’agit de ses propres citoyennes, elle a un devoir d’exemplarité en la matière.

Christine


1.  https://www.santemagazine.fr/actualites/actualites-sante/le-covid-19-a-eu-un-impact-sur-lacces-aux-soins-davortement-dans-toute-leurope-892809
2.  https://www.marieclaire.fr/allongement-delai-legal-ivg-pourquoi-la-loi-ne-passe-pas,1376896.asp
3.  Rapport d’information fait au nom de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes sur l’accès à l’interruption volontaire de grossesse par M.N. Battistel et C. Muschotti, députées. 16/09/20