Osez vous en libérer : Une Ode aux seins

Cet article est un témoignage sur l’arrêt du port du soutien-gorge. Mais aussi des idées reçues par les femmes sur ce vêtement et de leur peur de s’en défaire. Ce témoignage vise à encourager les jeunes femmes comme moi à s’en libérer, à son rythme, à aller au-delà des préjugés par l’acceptation de soi.

Je ne suis pas du genre à m’exprimer sur la toile mais une discussion m’a fait réaliser à quel point certains sujets méritent un instant d’étalage. L’autre soir, une amie a remarqué que je n’avais pas mis de soutien-gorge sous mon tee shirt. Je lui explique alors que j’ai arrêté d’en porter depuis mars. Et là, toute l’attention des filles se porte sur moi.  

« Mais non ? » « Mais comment tu fais ? » « Fais attention tes seins vont tomber !! » « Non mais vraiment je t’assure que ce n’est pas bon pour tes seins » « Et au travail ? » « Et quand tu cours ou marches vite? »  

Soudainement mes seins deviennent la préoccupation de tout le monde. Cela m’amuse. Mais je déchante quand je réalise qu’il est difficile de déconstruire les croyances dans lesquelles nous avons grandi, encouragées par nos parents et nourries chaque jour par notre société. 

Alors j’en profite pour faire une petite mise à jour sur les idées reçues :  

1- Des observations médicales  ont montré que le port du soutien-gorge au quotidien favoriserait la ptôse mammaire, c’est-à-dire la chute des seins, en affaiblissant les moyens de suspension naturels de la poitrine. Eh oui la nature étant bien faite, notre poitrine est fournie avec le kit complet ! Malheureusement le soutien-gorge rend nos ligaments paresseux qui au file des années ne remplissent plus leur fonctions naturelles…  

2- Sans porter de soutien-gorge, la poitrine s’embellit naturellement. Une étude menée par Jean-Denis Rouillon, médecin du sport à Besançon (1), a montré que sans soutien-gorge, la poitrine se raffermit, a meilleur aspect, les mamelons remontent d’en moyenne 7 mm par an, l’angle des mamelons se redresse, l’écart entre les seins diminue, les vergetures s’estompent, le sein prend un peu de volume, etc.. 

3- Le port du soutien-gorge au quotidien peut s’avérer nocif pour la santé car il entrave la circulation normale de la lymphe et du sang dans la poitrine, ce qui peut-être à l’origine de kystes douloureux. Une étude menée en 2016 (2) a même relevé des liens entre le port du soutien-gorge et le cancer du sein du fait de la mauvaise circulation de la lymphe. Affaire à suivre… 

Si au départ le soutien-gorge est apparu comme libérateur pour les femmes, il m’apparaît aujourd’hui comme un objet de contrainte. Un objet qui vise à faire disparaître une partie de notre corps. Nos seins doivent rester cachés. Oh oui bien sûr nous devons continuer à présenter une belle poitrine, bien remontée, un beau décolleté, mais le sein en tant que tel ne doit pas se laisser deviner. On croit marcher sur la tête.  

Je ne dis pas aux femmes « arrêtez toutes de porter des soutiens-gorge! ». Non, je dis portez-le en pleine conscience. Portez-le par choix et non par obligation. Pas par peur. Peur d’être aguicheuse, vulgaire, indécente, négligée et que sais-je encore.  

Je dis, osez vous en libérer !  

Petit à petit. Je ne l’ai pas fait du jour au lendemain. J’ai commencé il y a plusieurs années à ne plus en mettre l’été et les week-end. Puis l’hiver, en portant des body ou des vêtements très près du corps. J’achetais des soutiens-gorge de plus en plus légers. Et puis il y a eu le confinement. Alléluia. Depuis, je vis en parfaite harmonie avec mon corps. Bien sûr il faut s’habituer à une nouvelle image de soi, sous ses vêtements le rendu n’est plus le même : nos seins sont plus bas, plus écartés, moins rebondis. Et puis il y a ces tétons qui pointent le bout de leur nez par moment ! D’abord gênée, comme tout le monde, j’ai compris que cela faisait partie de mon corps. Je les laisse s’exprimer. Je laisse les gens les regarder aussi, car il n’y a que comme ça que leurs regards s’habitueront.  

J’aime mes seins. Ils sont doux, fermes, moelleux. Ils se baladent en même temps que moi, sautillent, rebondissent. Oui parfois ça fait mal. Ils dansent aussi. Il y a des jours où ils sont plus lourds que d’autres, plus gros, plus ronds. Ils vivent leur vie. Il m’arrive de jouer avec sans même m’en rendre compte. En bref ce sont des seins heureux. Et moi aussi. J’ai découvert un nouvel allié.  

Je suis une femme. J’ai des seins. Des tétons qui pointent. Je ne suis ni un objet sexuel ni un objet voué à procréer. Votre corps vous appartient et personne ne doit vous dire quoi en faire, ni ce qui est correct ou non. Je crois que nous seules pouvons reprendre le pouvoir de définir ce que représente notre corps, et surtout comment nous nous le représentons. Il n’a pas à être caché ou modelé pour convenir aux regards extérieurs, nous n’avons pas à en avoir honte.  Alors apprenons à nous aimer, nous qui sommes si plurielles, soutenons-nous les unes les autres et arrêtons de nous juger et de nous comparer. Jouissons de cette liberté. Vive nos seins !   

Océane Sohier

  1. – Présentation dans le cadre du colloque pluridisciplinaire « Le sein et ses représentations, Femme, médecine et société » organisé le 10 Octobre 2013 par le laboratoire C3S (culture sport, santé, société) à l’amphithéâtre de l’UPFR des sports.
  2. https://www.omicsonline.org/open-access/wearing-a-tight-bra-for-many-hours-a-day-is-associated-with-increasedrisk-of-breast-cancer-aot-1000105.pdf