FEMMAGE : Survivre. Panser. Retentir MELISSA PLAZA

Ex footballeuse internationale, doctoresse en psychosociale, féministe, coach et conférencière, Melissa Plaza sait varier les casquettes. La moins connue, c’est peut-être sa casquette d’artiste. Cette demi-finaliste de la coupe du monde Fifa U20 et deux fois championne de France est aussi à l’aise avec le ballon qu’avec les mots. Autrice du livre Pas pour les filles ?, elle nous partage aussi des slams depuis mars sur son compte Instagram «La taxe écarlate ». « Survivre, panser, retentir ». Ces trois mots résument son histoire.

Pour l’anniversaire de ses 4 ans, la petite Melissa reçoit une barbie à la place du ballon qu’elle avait demandé. A l’école primaire, lorsqu’on lui demande ce qu’elle voudrait faire plus tard, elle en est déjà sûre. Elle sera footballeuse professionnelle. Quand son père lui répond que ça n’existe pas pour les filles, elle ne se décourage pas et rentre en clubs. Dans son Ted Talk (disponible sur YouTube), Melissa Plaza évoque « un contrat tacite » placé entre ses parents et la société dès sa naissance. En tant que fille, ce contrat comprend la chambre rose, les jolies robes, la douceur et la sensibilité, la gymnastique… Toute son enfance, elle rompt activement le contrat sous les yeux médusés de sa famille.

Très ambitieuse, elle entame ses études de psychosociale en même temps que sa carrière de footballeuse qui lui décroche sa première sélection en équipe de France à 20 ans. Sa thèse porte sur ces stéréotypes qui entravent la pratique du sport pour les jeunes filles et garçons. Elle explique que bien avant la différenciation physique entre les sexes vers 12 ans, les sports sont déjà divisés en deux clans. Si aujourd’hui la société tente de surpasser ces discriminations genrées, Plaza nous rappelle l’histoire sur laquelle elles s’appuient. Au début du XXème siècle, les médecins déconseillent fortement aux femmes de pratiquer un sport.

Avec la bicyclette, les femmes gagnent le droit de porter le pantalon, raccourcir les jupes et s’éloigner un peu du foyer. Mais on la taxe vite de «machine à stérilité» ou encore « pratique masturbatoire ». En 1912, Pierre de Coubertin restaure les jeux olympiques et affirme qu’« une olympiade femelle serait impratique, inintéressante, inesthétique et incorrecte. ». Les femmes sont là pour regarder et couronner les hommes vainqueurs. En 2020, l’olympisme est toujours défini par la charte olympique comme « un droit de l’homme » et avec un petit H.

On le remarque, les conditions de travail pour les footballeuses pro débutantes sont extrêmement difficiles avec des salaires très bas (400€ nets par mois pour Plaza) pour un travail à temps plein composé de 6 à 8 entraînements par semaine, des déplacements, matchs le week-end, entremêlés d’un job alimentaire ou de cours à la fac.

Sur son compte « La taxe écarlate », Mélissa Plaza interroge ces concepts de féminité et masculinité et utilise le slam pour panser ses blessures et soulager ses traumas.

« Tu es belle » Cette phrase, ils te l’ont répétée, tellement répétée que tu as l’impression que ta beauté est une qualité. Ta seule et unique qualité. Aucun mérite pourtant, c’est le loto héréditaire. Mille autres atouts te rendent bien plus dignitaire. Cette phrase, ils te l’ont tellement répétée que tu ne sais pas, tu ne sais plus si tu mérites tout ce que tu as obtenu. Tu es pourtant démente, brillante, autonome, bardée de diplômes. Cette phrase, ils te l’ont tellement répétée que tu en as perdu toute crédibilité, toute humanité. Femme déchue, sous le regard des hommes tu n’es plus. »

Elle slam le harcèlement, les violences sexuelles, l’amour en patriarcat, le genre et la beauté. Héroïne par tes accomplissements, ta lutte et tes convictions, Mélissa Plaza nous te rendons femmage. Pour finir, ton message d’espoir : « Si j’avais écouté tous les gens qui me disaient que c’était impossible […], je serais probablement passée à côté des meilleurs moments de ma vie. ».

MATHILDE GAMOT

#OLF58

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