Droit à l’IVG: Le corps des femmes est le champ de bataille du patriarcat

En 2019, il est toujours possible d’avorter en France. Mais pour combien de temps ? Depuis plusieurs mois, ce droit, acquis il y a 44 ans, tient bon et ne rompt pas devant les forces employées par ses détracteurs pour le faire disparaître.

Des entraves à la liberté d’avorter en France? Dans le contexte conservateur de l’époque, on peut continuer à saluer l’acharnement de Simone Veil et de ses collaboratrice.eur.s pour que les femmes puissent enfin disposer de leur corps. En 2019, ce concept n’apparaît-il pas dépassé ?

Malgré tout le bon sens possible, la réponse demeure impassiblement non. Dans cet environnement toujours conservateur, les panégyristes de la clause de conscience ne faiblissent pas. L’article R.4127-47 du code de santé publique reste ainsi l’écrin doré d’une clause superfétatoire qui continue de prétendre que l’IVG est un acte particulier. Le corps médical dans sa grande majorité manifeste son opposition à l’abolition de ladite clause. Que peut-on y voir d’autre qu’une volonté toujours plus accrue de s’approprier le corps des femmes ?

Si la Ministre de la Santé a commandé un état des lieux sur l’invocation de la clause de conscience sur le sol français, la question demeure sans réponse depuis septembre dernier. D’ailleurs, les pouvoirs publics continuent de rendre ardue la défense de ce droit. La disparité territoriale n’a de cesse de s’accroître. Les maternités ferment, les centres de santé où sont pratiqués les IVG aussi.

Aujourd’hui, le nombre d’IVG pratiqués en dehors d’un centre hospitalier est en constante augmentation. La raison? La plupart des femmes résident
à plus d’une heure d’un lieu spécialisé. Contraint de se rendre à l’évidence face aux détracteurs toujours plus nombreux, le gouvernement a mis en œuvre une loi pénalisant le délit d’entrave numérique en 2017. Depuis 2013, les groupes « anti-IVG » n’ont de cesse de grandir. Légitimés par la montée des populismes en Europe, ces extrémistes religieux continuent d’acquérir visibilité et pouvoir.

Et, du coup, la culpabilisation des femmes continue, leurs corps demeurent à disposition de tous sauf d’elles-mêmes.


Spotlight autour du monde.


On ne peut que constater, de manière alarmante, que les droits des femmes sont globalement en régression. En particulier, le choix des femmes d’avoir
recours à l’avortement. Ainsi, dans le monde, un avortement sur deux est illégal. Toutes les 9 minutes, c’est une femme qui décède en raison d’un
avortement pratiqué dans la clandestinité.

Aux Etats-Unis, certains Etats, comme le Texas, ont mis en œuvre des mesures législatives punitives envers les femmes qui oseraient avorter. Depuis décembre 2016, une femme ayant eu recours à l’IVG se voit dans l’obligation d’enterrer son fœtus. Les USA, sous l’égide d’un homme qui veut du mal aux femmes, continuent de déposséder les femmes de leurs droits et de leurs corps.

Actuellement, en Amérique latine, seuls trois pays – l’Uruguay, la Guyane et Cuba – autorisent les femmes à avorter. Pourtant les femmes n’ont de
cesse de revendiquer leurs droits. Si les manifestations mémorables organisées par les Argentines ont défrayé la chronique, le Parlement est demeuré sourd à leur appel. En Amérique centrale, aucun Etat n’autorise le recours à l’IVG. La législation y est d’ailleurs particulièrement restrictive comme au Salvador où deux jeunes femmes ont été emprisonnées pour homicide à la suite de leurs fausses couches. Nous n’avons donc pas fini de réclamer le droit de disposer librement de notre corps et celui de nos sœurs. Nous continuons de souffrir dans l’indifférence générale. Certaines d’entre nous continuent de mourir. Viendra le temps où les femmes vaincront le patriarcat, en attendant, la mobilisation continue.

Charlène