Danielle Gaudry, histoire d’une militante pour l’IVG

A l’occasion de notre dossier sur l’IVG, rencontre avec Danielle Gaudry, gynécologue et militante féministe qui a lutté pour l’accès à l’IVG en France. Retour dans les seventies en compagnie d’une grande dame du militantisme.

Danielle Gaudry a 20 ans lorsqu’elle fait face pour la première fois, dans son entourage, à un besoin d’avortement. Sa colocataire, profitant de la liberté sexuelle post 68 comme elle, tombe enceinte. La future gynécologue se retrouve impuissante : « j’avais la sensation d’être démunie, de ne pas pouvoir l’aider », nous confie-t-elle. C’est l’époque pour Mme Gaudry de ses premières participations aux mouvements militants. Déjà elle constate « le machisme d’extrême gauche », ce qui l’amène à participer à la lutte féministe.

« A l’époque tout était à faire »

Etudiante en médecine, elle suit les cours du Dr Dalsace, gynécologue et ancien président du Mouvement pour le Planning Familial. « A l’époque, tout était à faire, explique-t-elle, j’ai donc commencé par la pose de sondes à la demande sur des femmes ayant besoin d’avorter avec du matériel stérile. Il faut dire que les stages en milieu hospitalier permettaient l’approvisionnement ! Puis je les orientais vers des établissements qui complétaient l’avortement, sans risque pour leur santé. » Elle participe ensuite au MLAC (Mouvement pour la Liberté de l’Avortement et de la Contraception) et s’initie à la méthode Karman (ndlr. méthode inventée par des féministes américaines et qui se base sur des canules plus souples). « Nous accueillions les femmes dans un appartement privé, l’accueil était collectif et chacune racontait sa situation. Certaines avaient les moyens de partir à l’étranger et d’autres ne le pouvaient pas. Après avoir vérifié la taille de l’utérus, nous décidions ensemble : femmes et militantes, qui allait bénéficier d’une aspiration sur place. Il y avait toujours plusieurs personnes dans la pièce. » Mais à l’époque le corps médical est réticent à pratiquer l’avortement. « Soutenues par une vague idéologique de progrès, tout nous semblait possible, raconte pourtant Danielle Gaudry, nous pouvions réinventer le monde, expérimenter, contester l’autorité et la hiérarchie ! » En 1975, la loi légalisant l’IVG est adoptée. Les pratiques des médecins changent. Puis, en 1978, Danielle Gaudry termine sa spécialité en gynécologie obstétrique. « Depuis, chaque moment de ma vie a été alimenté par de grandes ou de petites modifications de la société, conclue-t-elle. Certaines m’ont enthousiasmée d’autres déçue par le manque de courage de nos dirigeants. Ce qui m’a toujours ravie ce sont les relations et les échanges que la sororité permettait. »

Claire, propos recueillis par Raphaëlle Rémy-Leleu

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