Chronique du sexisme ordinaire
SORORITÉ, Réponse aux récentes diatribes antiféministes
A l’heure où on nous dit que le séparatisme est dangereux, la réconciliation semble pour autant difficile.
A l’heure où les médias sont essentiellement dirigés par des hommes, on a à cœur de nous opposer les unes aux autres.
A l’heure où un chemin universaliste semble être la voie, on caricature notre combat pour en faire uniquement une énième chasse aux sorcières.
Sauf que la persécution dont il s’agit s’exerce entre femmes. Ces femmes qui, en même temps qu’elles dénoncent de nouveaux maccarthysmes, n’ont pas le choix que de s’appliquer à en reproduire les schémas de domination. Oui, la haine est bien là, et nous ne faisons qu’imiter ce que nous connaissons déjà trop bien. Il est certain qu’il est moins dangereux, en 2020 encore, de mettre les femmes qui parlent, les activistes, les féministes, sur l’échafaud, plutôt que ceux que la justice s’essaie difficilement à juger coupables.
Sauf que le coup de projecteur est mis sur nos divergences. Là où nous semblons encore perdre du temps en luttes intestines, l’entre soi que nous voulons combattre gagne encore du terrain.
Sauf que nous sommes prêtes à assassiner des sœurs de cœur, des sœurs racisées , des sœurs de lutte, seulement pour expier une colère que certaines d’entre nous ne peuvent pas, ou plus, diriger vers leurs principaux adversaires. Pire que de substituer une domination à une autre, les récentes tribunes médiatiques nous montrent simplement ce que nous ne faisons que reproduire.
Oui, on se trompe de combat. Le vrai combat ? Se défendre d’un système gouverné par la prédation et cette volonté égalitariste étalonnée sur des valeurs patriarcales, à laquelle vous faîtes, Mesdames, un bruyant écho.
Oui, nous sommes féministes et fières de l’être. Nous ne cherchons pas à en faire quelque chose de nouveau. Les injustices perdurent et sont les mêmes. Les femmes violées, maltraitées, excisées, mal payées – vous avez raison de les nommer – sont toujours femmes. Il n’y a qu’un seul mouvement féministe, celui qui dit, qui dénonce, qui réfléchit, qui propose, qui agit, qui forme, qui inspire les politiques publiques. Oui, notre combat est politique.
Nous ne sommes pas indignées à vous lire. Juste désolées. Et d’autant plus convaincues du sens de l’histoire, de cette belle « rupture d’évidence » connue à nouveau il y a quelques années, et qui vient troubler certaines logiques homéostatiques. Ce qui était encore acceptable hier, pour celle des nôtres encore attachées à l’Ancien monde, ne l’est plus aujourd’hui. Et nous allons nous appliquer à nouveau avec attention dans cette voie, ne vous en déplaise. Car ce qui fait avant tout sens pour nous, bon gré mal gré, et malgré certaines de vos récentes et trop régulières diatribes, tellement dans le cours juste de l’évolution sociale, historique et politique. C’est sincèrement ce sentiment de sororité que nous aimerions partager avec vous aujourd’hui. SORORITÉ. Juste ça, et pourtant déjà visiblement un grand pas !
Anaïs Gal