LesBieFamily : enterrons la lesbiephobie !

Dans un contexte de violences exacerbées par les débats sur l’ouverture du mariage à tous les couples, 60% des lesbiennes et bies déclarent avoir été victimes de discriminations liées à leur orientation sexuelle.

La lesbophobie désigne “l’aversion, le mépris ou la haine à l’égard des lesbiennes”. Elle “se manifeste par des comportements de rejet, de discrimination et de violence où se conjuguent homophobie et sexisme”. La lesbophobie postule notamment qu’il est impossible à une femme de vivre une sexualité sans homme. Elle condamne les lesbiennes “parce qu’elles transgressent les rôles et brisent la structure des rapports d’appropriation et d’oppression des hommes sur les femmes”. Les bisexuelles peuvent en outre se voir reprocher de ne pas exprimer de préférence exclusive pour les femmes ou les hommes (biephobie). Nous parlerons de “lesbiephobie” pour désigner ces deux formes de discrimination.

Alors que la famille devrait être un havre de paix où l’on se sent accepté-e sans réserve, les lesbiennes et les bies n’y sont pas épargnées. Avec la campagne LesBieFamily, Osez le Féminisme ! dit non à la lesbiephobie !


Boutin merdoie, la justice passe

« L’homosexualité est une abomination ! ». Cette phrase, Christine Boutin, ex-présidente du Parti Chrétien-Démocrate, l’a prononcée face à un journaliste en avril 2014. Les associations Inter-LGBT, Le Refuge et Mousse se sont portées parties civiles pour le procès et ont dénoncé des propos qui participent de l’exclusion et de la stigmatisation des personnes homosexuelles et lesbiennes. La défense de l’ancienne ministre et ex-porte-parole des anti-PACS, affirmant « j’ai des amis homosexuels » et « cela ne veut absolument pas dire que je condamne les personnes homosexuelles », n’a pas convaincu les juges. Christine Boutin a été condamnée à 5000 euros d’amende pour « provocation à la haine ou à la violence », et à 2000 euros pour les associations Le Refuge et Mousse. Ce n’est que depuis 2004 que des propos d’incitation à la haine en raison de l’orientation sexuelle peuvent être condamnés. Elle a annoncé faire appel.

JM


Double-peine

La famille est trop souvent le lieu de discriminations sexistes pour les filles et les femmes. Elle est le vecteur d’une culture commune (origines, croyances, pratiques, traditions…) ; la transgresser suscite l’incompréhension, le rejet, voire la violence de la part du groupe familial. Dans une société qui reste patriarcale, l’indépendance des femmes (divorce, célibat choisi, refus des stéréotypes de genre…) peut être mal vue par la famille, quand elle enfreint son système de valeurs.

Pour les lesbiennes et les bies, ces discriminations peuvent se doubler de violences spécifiques liées à la norme hétérosexuelle. Sous couvert du qu’en-dira-t-on ou de la religion, certains parents choisissent d’exclure leur propre fille des réunions de famille ; d’autres refusent de rencontrer sa compagne, d’interagir avec elle ou d’en entendre parler, instaurant un oppressant silence.

Les victimes d’autres discriminations (racistes, socio-culturelles, religieuses…) subissent rarement ces violences au sein de leur famille proche, contrairement aux lesbiennes et aux bies. Exception faite de l’espace public, la famille est le lieu où s’exprime le plus fréquemment la lesbiephobie : incompréhension (72%), rejet (66%), insultes (38%), moqueries (30%) en sont les manifestations les plus tangibles.

Ces discriminations touchent surtout les adolescentes et les jeunes adultes, souvent tributaires du logis ou du soutien financier de leurs parents. À un âge important dans le développement personnel, cette forme de harcèlement induit une grande souffrance psychique.

Invisibilité

Ce climat oppressant peut obliger les lesbiennes et les bies à s’effacer. Près de 75% d’entre elles s’abstiennent de faire part de leur orientation sexuelle à l’ensemble de leur famille. Elles n’osent pas démentir leur hétérosexualité auprès de celles et ceux qui la présument, ou prennent leur compagne pour une simple amie. Quant aux familles, elles s’accommodent volontiers de ces non-dits.

D’autres décident d’assumer leur sexualité au sein de leur famille. C’est souvent à ce moment-là que les choses dégénèrent. Certaines familles se murent dans le déni ou s’emploient à faire “changer” ces trouble-fête à grand renfort de culpabilisation. Assumer sa compagne en famille ? Un caprice. Refuser de “ménager” les parents ? Égoïsme forcené. Les familles exhortent ces jeunes femmes à réintégrer le rang. À quel prix ?

La familles « traditionnelle » fantsmée par le patriarcat ne recouvre pas la réalité sociétale

Par leurs injonctions patriarcales, ces familles insinuent qu’une femme a besoin d’un partenaire masculin pour exister. Tout est fait pour dénigrer, voire nier la sexualité féminine, ce qui induit un cercle vicieux, déplore la Coordination lesbienne en France : les discriminations poussent à l’invisibilité, qui aggrave à son tour la lesbiephobie.

Conséquences dramatiques

Ce rejet a des répercussions dramatiques pour les lesbiennes et les bies. “Dans le cadre familial, 62% des faits entraînent des conséquences pratiques”. Un chiffre deux fois plus élevé que pour l’ensemble des discriminations lesbophobes et biephobes (30%).

Les conséquences physiques, matérielles et/ou psychologiques de ce rejet sont terribles. Le conflit peut aller jusqu’à la rupture

familiale (41%), avec des effets particulièrement dévastateurs pour les plus jeunes : déménager pour échapper au harcèlement, se retrouver à la rue, rater ses examens… Ces situations sont non seulement précarisantes, mais traumatisantes. Faute d’approbation familiale, de nombreuses lesbiennes et bies éprouvent des difficultés à vivre leur sexualité. Elles font état d’épisodes dépressifs, de crises d’angoisse… Souvent, le conflit familial nourrit un sentiment de culpabilité qui crée des tensions au sein du couple.

Rappelons que la famille “traditionnelle” fantasmée par les tenants du patriarcat ne saurait recouvrir la réalité sociétale. Il existe en France des familles nombreuses, recomposées, monoparentales, hétéroparentales, homoparentales, lesboparentales… Il est temps de déconstruire les clichés et de lutter contre l’ignorance, la peur et la haine, d’autant plus violentes qu’elles émanent de l’entourage familial. Interrogeons-nous moins sur les motivations supposées des lesbophobes/biephobes, et davantage sur le vécu des personnes exclues de leur propre famille en raison de leur orientation sexuelle.

 

Pour une année lesbiephilestickers2

À l’approche des fêtes de fin d’année, le groupe Lesbieféministes d’Osez le Féminisme ! est passé à l’offensive pour combattre la lesbiephobie. Le 11 décembre, nous avons solennellement enterré la lesbiephobie au Bar’Ouf, à Paris.

L’année 2013 a vu le mariage s’ouvrir aux couples de même sexe en France. Pour 2016, nous demandons que l’égalité des droits s’applique à toutes et à tous, dans tous les domaines. Nous appelons François Hollande à honorer sa promesse de 2012, en ouvrant enfin la PMA aux couples de femmes.

Petite Maman Noëlle, faites que 2016 soit une année lesbiephile !

Marianne


Mariage pour tou-te-s : la pièce montée n’atteint pas des sommets

18 mai 2013 : après des débats tendus qui ont mis en lumière une frange ultra conservatrice et réactionnaire de la société, la loi Taubira est promulguée et permet à deux femmes ou deux hommes de se marier. Deux ans et demi après, où en sommes-nous ? En 19 mois, 17 500 unions de personnes de même sexe ont été célébrées, dont 40% concernent des lesbiennes. Ces mariages sont souvent sujets à tensions : des élu-e-s continuent de refuser d’appliquer les lois françaises, faisant de ce jour de bonheur un rappel à une réalité souvent lesbophobe et homophobe.

Bien que 68% des Français-es se disent en faveur du mariage pour tou-te-s, les actes lesbophobes, homophobes et biephobes ont augmenté. Beaucoup de chemin reste à parcourir pour une parfaite égalité des familles : si le mariage pour tou-te-s a été gagné, l’adoption reste un parcours de la combattante et la PMA se fait toujours attendre.

Groupe LesBieFamily

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