Les comptines pour enfants : le sexisme dès le plus jeune âge

Tu as déjà trouvé, étant petit-e, les paroles de certaines chansonnettes assez obscures ? Que fait la voisine de Pierrot (Au clair de la lune) en « bat[tant] le briquet » ? Pourquoi Pierrot envoie chez elle « l’aimable lubin » (tout s’éclaire quand on sait que le lubin est un moine dépravé) pour qu’elle lui rallume sa « chandelle morte » ? (Personne n’a jamais songé à dénoncer Pierrot pour proxénétisme ?) Pourquoi la gamine ne veut-elle pas aller A la pêche aux moules, et d’abord, qu’est-ce qui leur prend aux « gars des villes » à « poursuiv[re] » les jeunes filles pour leur voler leurs « paniers » ? Les exemples sont foison : parlons aussi de La Mère Michel ou d’Il était une bergère. Non, il ne s’agit pas de bougie, d’osier ou d’animal ronronnant. Dans ta bouche d’enfant, sur le chemin de la plage avec tes cousin-e-s, tu chantais à tue-tête l’apologie du viol, du mariage forcé et de la prostitution. A coups de contrepèterie (« Il court il court le furet » : l’histoire du curé violeur du bois joli qui « repasse[ra] par là », sous-entendu, gare à tes fesses), de « choubidoubidouwa » (La petite mandarine a un « gros pépin » après le « zeste déplacé » du p’tit gars citron), et de métaphores (le chat est le sexe féminin ou parfois la virginité), on réduit la fille à son vagin violable à souhait : chantage sexuel dans A la Claire fontaine (son ami Pierre la largue parce qu’elle lui refuse son « bouton de rose »), viol collectif dans A la pêche aux moules d’une fille déjà issue d’un viol (« T’y allais aussi maman » / « Et je suis là maintenant »), mariage forcé pour Jeannette qui, contrairement au titre de la chanson, pleure un peu trop (tu m’étonnes, pour la consoler on ne lui offre pas un mouchoir ou du chocolat mais un mari), et finit donc « pendouill[ée] » parce que ça suffit de désobéir, hein. Dans la même veine, Sur le pont du nord on assassine tout simplement la jeune fille qui a fait le mur pour aller danser. Conclusion : « Voilà le sort des enfants obstinés ». Les comptines, idéales pour formater les plus jeunes à la culture du viol dès l’enfance !

Louise

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